Un cerveau chaotique pour mieux s’adapter

Des micro-états se succèdent dans une conscience «en roue libre»

Lorsqu’on le laisse flâner à sa guise, le cerveau passe par une succession chaotique d’états différents, qui lui permettrait de s’adapter rapidement à une nouvelle situation. C’est ce que suggère une étude de l’Université de Genève et de l’EPFL, parue mardi dans les Annales de l’académie américaine des sciences (PNAS).

Les chercheurs ont enregistré l’activité du cerveau «en roue libre» de plusieurs personnes. Au moyen d’un électroencéphalogramme (EEG), qui mesure l’activité électrique à l’échelle de la milliseconde, et de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), qui identifie les zones activées, toutes les dix secondes environ. Le cerveau passe par une succession de micro-états, où le signal électrique est stable, pendant une durée de 100 millisecondes en moyenne. Les scientifiques distinguent quatre micro-états différents, identifiés comme visuel, auditif, introspectif et attentionnel, selon un autre article de la même équipe dans Neuroimage.

Structure fractale

Or il s’avère que ces états se succèdent avec une organisation comparable, qu’on les observe à l’échelle de la milliseconde (avec l’EEG) ou de la dizaine de secondes (avec l’IRMf). Une similarité d’échelle «fractale», typique des régimes chaotiques. «Ce comportement se produit en physique dans des états critiques, comme quand le gaz devient liquide, où tout peut se réorganiser rapidement, explique Dimitri Van De Ville, un des auteurs. Apparemment, en pensée libre, le cerveau se maintient dans un état où il est capable de s’adapter très vite.»

Les chercheurs comptent se pencher sur d’autres états de conscience, comme le sommeil, ou des maladies mentales. Chez les schizophrènes, explique Thomas Koenig, spécialiste du sujet à l’Hôpital psychiatrique universitaire de Berne, un des quatre micro-états est plus court. Il se pourrait qu’un mécanisme soit interrompu, comme par exemple celui qui permet d’identifier une voix intérieure comme étant la nôtre, provoquant des hallucinations auditives.


Source : letemps.ch