Pour le compost, des particuliers parisiens se mettent aux vers

Dans la cave, sur le balcon ou carrément dans la cuisine, le lombricompostage sort de la confidentialité pour s'afficher au grand jour chez les particuliers parisiens sans jardin, soucieux de faire leur propre compost et d'allèger du même coup leurs ordures ménagères.

Cette méthode de compostage consiste à produire du terreau très fertile à l'aide de milliers de vers de fumier, qui décomposent les déchets organiques via un système de bacs empilés. La décomposition est ainsi accélérée, réduite à deux à trois mois, au lieu d'un an avec un bac à compost classique.

"Contrairement aux idées reçues, le lombricompostage n'a rien de +nauséabond+ ou de +dangereux+ dans un appartement", déclare Pascal Bildstein, propriétaire d'une "poubelle vivante" dans le Ier arrondissement.

"C'est un moyen efficace pour réduire d'au moins 30% ses restes de cuisine, qui ne coûteront rien à la collectivité", certifie ce militant écolo.

Outre le compost, "excellent pour les jardinières", cette technique permet d'obtenir le "thé des vers", un engrais liquide riche en nutriments et oligo-éléments.

Quant aux odeurs, on vous assure, envers et contre tout, qu'il n'y en a pas: "juste une légère odeur de sous-bois", assure Laurent Bernard, qui s'est lancé il y a quatre ans dans le lombricompostage.

A condition toutefois de "suivre des règles très précises" : "Il ne faut pas trop leur donner à manger, juste des épluchures, fleurs fanées, marc de café, sachets de thé ou coquilles d'oeufs broyées et surtout ne pas oublier d'ajouter la matière sèche", explique Alan Le Jéloux, qui partage son studio du XVe arrondissement avec 2.000 colocataires grouillants.

Une cohabitation pas forcément du goût de sa petite amie. "Au début, elle avait peur que les vers sortent, d'en retrouver partout sur le sol, dans le lit, mais finalement elle s'est habituée", ajoute-t-il.

Voix critique, Philippe Thauvin, de l'Agence pour le développement et la maîtrise de l'énergie (Ademe), souligne que la pratique exige certaines connaissances et que "tout le monde ne peut pas se lancer dans l'élevage de vers à domicile".

"Il ne faut ni donner de viandes, ni d'agrumes (trop acides), ni d'ail ou d'échalote (vermifuge), sinon gare aux rongeurs et aux nuages intempestifs de moucherons", poursuit cet ingénieur spécialisé dans le compostage des déchets ménagers.

"Ca reste moins contraignant qu'un chien. Les vers ne coûtent rien, pas besoin de les sortir ou de leur acheter des croquettes", s'amuse Alan Le Jéloux, qui a créé sa société pour commercialiser des lombricomposteurs.

Sortis de la confidentialité, ces appareils, vendus en jardineries et sur internet, ont vu leur prix diminuer, passant de 200 euros il y a cinq ans à une centaine d'euros en moyenne aujourd'hui.

"Le phénomène est difficile à chiffrer car beaucoup de personnes fabriquent eux-mêmes leur propre lombricomposteur. Une chose est sûre, les gens en parlent plus facilement aujourd'hui", explique Anne-Laure Wittmann, spécialiste des déchets au sein de l'ONG Les Amis de la Terre.

Pour Sophie Delègue, institutrice en maternelle dans le quartier de Belleville, "c'est un dispositif fantastique pour expliquer aux enfants le cycle de la vie et le processus de recyclage des déchets". "Au départ les élèves étaient intimidés, maintenant ça les amuse".

Sur internet, de nombreux sites sont dédiés à ce phénomène: "Il commence à y avoir une vraie communauté de lombricomposteurs", selon Alan Le Jéloux. "Lombric-à-brac", un blog spécialisé, propose ainsi faire partager son cheptel de vers aux nouveaux propriétaires désireux de se lancer.


Source : tv5.org