Découverte de « cellules caméléon » : une piste pour une meilleure cicatrisation ?
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Découverte de « cellules caméléon » : une piste pour une meilleure cicatrisation ?
Des cellules qui, de manière surprenante, changent
d'identité pendant l'embryogénèse viennent d'être mises en évidence chez
la drosophile par des chercheurs du CNRS et de l'Université de Nice
(1). En étudiant ces « cellules caméléon » dans un modèle de
cicatrisation, les scientifiques ont démontré qu'elles favorisent le
relâchement de la tension tissulaire, permettant à l'épiderme de se
souder parfaitement. Publiés le 8 juin dans PloS Biology, ces travaux
révèlent comment les tissus s'adaptent lors de leur soudure pendant le
développement embryonnaire. Ils pourraient ouvrir une nouvelle voie de
recherche en médecine régénérative.
Les cellules qui composent les organismes multicellulaires
ne sont pas identiques. Il en existe différents types : cellules de la
peau, du foie, neurones... Issues de cellules « précurseurs » non
spécialisées, ces cellules se spécialisent grâce au mécanisme de
différenciation. De plus, pendant le développement embryonnaire, les
cellules sont organisées en compartiments étanches qui s'avèrent
essentiels à l'assemblage correct des organes (2). Au sein de ces
compartiments, les cellules obéissent à deux règles : une fois
différenciées, elles conservent cette identité qui leur est propre, et,
les cellules d'un compartiment donné restent ensemble, ne se mélangeant
jamais avec celles d'un autre compartiment.
Les chercheurs ont
mené leur étude sur des embryons de drosophile (3) pendant la «
fermeture dorsale ». Au cours de cette étape clé de la morphogénèse (4)
chez la drosophile, deux épidermes se rencontrent et se referment. Ce
phénomène de soudure tissulaire est semblable à la soudure d'une plaie
après coupure, et représente donc un bon modèle de cicatrisation. En
observant les embryons vivants au cours de la fermeture dorsale, les
scientifiques ont remarqué un type de cellules qui brise les deux lois
évoquées ci-dessus. En effet, ces « cellules caméléon » (5) sont
capables de changer d'identité puis de compartiment, et ce dans des
conditions normales de développement de l'embryon (sans blessure par
exemple). Le changement d'identité ou plasticité cellulaire était déjà
connu dans des cas pathologiques (régénération suite à une blessure ou
une pathologie, etc), où le plus souvent, la re-différenciation de la
cellule requiert une ou plusieurs divisions cellulaires. Ici, la
plasticité cellulaire se produit sans passer par cette étape. Les
chercheurs ont démontré qu'elle était contrôlée par des gènes
spécifiques qui interviennent également dans la régénération tissulaire
de la drosophile adulte : il s'agit de la voie de signalisation JNK, qui
existe aussi chez les vertébrés. Ce mécanisme de plasticité cellulaire
génétiquement contrôlé est un comportement cellulaire unique, qui
n'avait encore jamais été observé dans le développement embryonnaire.
Une
fois différenciées, les cellules caméléon changent de compartiment
cellulaire alors que les frontières de celui-ci étaient réputées
infranchissables. Et, plus le nombre de cellules ayant migré dans le
compartiment de destination est important, plus la tension au sein des
tissus diminue. Les scientifiques ont découvert que le mécanisme de
plasticité cellulaire des cellules caméléon induisait, via un processus
encore inconnu, des mouvements d'intercalation de cellules annexes, ce
qui confère aux tissus la capacité à s'adapter aux variations de tension
qui ont lieu au cours de la morphogénèse de l'embryon. Pour cela, une
zone appelée « compartiment de relaxation » est créée : elle permet aux
tissus (ici, l'épiderme) de relâcher leur tension pendant la soudure
tissulaire. Dès lors, la soudure entre les tissus pendant la fermeture
dorsale de l'embryon de la drosophile (phénomène semblable à la
cicatrisation de l'épiderme) peut avoir lieu de façon parfaite,
c'est-à-dire sans cicatrice visible.
Ces travaux mettent en
évidence un nouveau mécanisme de plasticité cellulaire pendant la
morphogénèse. Compte tenu des similitudes observées entre le phénomène
de soudure tissulaire ici étudié et la cicatrisation, ces résultats
pourraient apporter une nouvelle voie d'étude des mécanismes cellulaires
en jeu lors de la cicatrisation.
© Fanny Serman et
Stéphane Noselli
Embryon de drosophile en
cours de fermeture dorsale. La région en couleur est la zone de soudure
de l'épiderme. Les cellules caméléon se trouvent à la jonction des deux
compartiments, celui d'origine (en vert) et celui de destination (en
rouge).
Notes :
(1) appartenant notamment à l'Institut de biologie du
développement et cancer (IBDC, CNRS/Université de Nice)
(2) Ces compartiments sont appelés segments chez les insectes ou
rhombomères dans le cerveau antérieur des vertébrés.
(3) un organisme très souvent utilisé comme système modèle
(4) La morphogénèse est une étape de l'embryogénèse pendant laquelle se
développent les formes et organes d'un organisme.
(5) Ou Mixer-cell en anglais
http://www2.cnrs.fr/presse/communique/1909.htm?&debut=16
d'identité pendant l'embryogénèse viennent d'être mises en évidence chez
la drosophile par des chercheurs du CNRS et de l'Université de Nice
(1). En étudiant ces « cellules caméléon » dans un modèle de
cicatrisation, les scientifiques ont démontré qu'elles favorisent le
relâchement de la tension tissulaire, permettant à l'épiderme de se
souder parfaitement. Publiés le 8 juin dans PloS Biology, ces travaux
révèlent comment les tissus s'adaptent lors de leur soudure pendant le
développement embryonnaire. Ils pourraient ouvrir une nouvelle voie de
recherche en médecine régénérative.
Les cellules qui composent les organismes multicellulaires
ne sont pas identiques. Il en existe différents types : cellules de la
peau, du foie, neurones... Issues de cellules « précurseurs » non
spécialisées, ces cellules se spécialisent grâce au mécanisme de
différenciation. De plus, pendant le développement embryonnaire, les
cellules sont organisées en compartiments étanches qui s'avèrent
essentiels à l'assemblage correct des organes (2). Au sein de ces
compartiments, les cellules obéissent à deux règles : une fois
différenciées, elles conservent cette identité qui leur est propre, et,
les cellules d'un compartiment donné restent ensemble, ne se mélangeant
jamais avec celles d'un autre compartiment.
Les chercheurs ont
mené leur étude sur des embryons de drosophile (3) pendant la «
fermeture dorsale ». Au cours de cette étape clé de la morphogénèse (4)
chez la drosophile, deux épidermes se rencontrent et se referment. Ce
phénomène de soudure tissulaire est semblable à la soudure d'une plaie
après coupure, et représente donc un bon modèle de cicatrisation. En
observant les embryons vivants au cours de la fermeture dorsale, les
scientifiques ont remarqué un type de cellules qui brise les deux lois
évoquées ci-dessus. En effet, ces « cellules caméléon » (5) sont
capables de changer d'identité puis de compartiment, et ce dans des
conditions normales de développement de l'embryon (sans blessure par
exemple). Le changement d'identité ou plasticité cellulaire était déjà
connu dans des cas pathologiques (régénération suite à une blessure ou
une pathologie, etc), où le plus souvent, la re-différenciation de la
cellule requiert une ou plusieurs divisions cellulaires. Ici, la
plasticité cellulaire se produit sans passer par cette étape. Les
chercheurs ont démontré qu'elle était contrôlée par des gènes
spécifiques qui interviennent également dans la régénération tissulaire
de la drosophile adulte : il s'agit de la voie de signalisation JNK, qui
existe aussi chez les vertébrés. Ce mécanisme de plasticité cellulaire
génétiquement contrôlé est un comportement cellulaire unique, qui
n'avait encore jamais été observé dans le développement embryonnaire.
Une
fois différenciées, les cellules caméléon changent de compartiment
cellulaire alors que les frontières de celui-ci étaient réputées
infranchissables. Et, plus le nombre de cellules ayant migré dans le
compartiment de destination est important, plus la tension au sein des
tissus diminue. Les scientifiques ont découvert que le mécanisme de
plasticité cellulaire des cellules caméléon induisait, via un processus
encore inconnu, des mouvements d'intercalation de cellules annexes, ce
qui confère aux tissus la capacité à s'adapter aux variations de tension
qui ont lieu au cours de la morphogénèse de l'embryon. Pour cela, une
zone appelée « compartiment de relaxation » est créée : elle permet aux
tissus (ici, l'épiderme) de relâcher leur tension pendant la soudure
tissulaire. Dès lors, la soudure entre les tissus pendant la fermeture
dorsale de l'embryon de la drosophile (phénomène semblable à la
cicatrisation de l'épiderme) peut avoir lieu de façon parfaite,
c'est-à-dire sans cicatrice visible.
Ces travaux mettent en
évidence un nouveau mécanisme de plasticité cellulaire pendant la
morphogénèse. Compte tenu des similitudes observées entre le phénomène
de soudure tissulaire ici étudié et la cicatrisation, ces résultats
pourraient apporter une nouvelle voie d'étude des mécanismes cellulaires
en jeu lors de la cicatrisation.
© Fanny Serman et
Stéphane Noselli
Embryon de drosophile en
cours de fermeture dorsale. La région en couleur est la zone de soudure
de l'épiderme. Les cellules caméléon se trouvent à la jonction des deux
compartiments, celui d'origine (en vert) et celui de destination (en
rouge).
Notes :
(1) appartenant notamment à l'Institut de biologie du
développement et cancer (IBDC, CNRS/Université de Nice)
(2) Ces compartiments sont appelés segments chez les insectes ou
rhombomères dans le cerveau antérieur des vertébrés.
(3) un organisme très souvent utilisé comme système modèle
(4) La morphogénèse est une étape de l'embryogénèse pendant laquelle se
développent les formes et organes d'un organisme.
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