Un marqueur universel de tous les cancers ?

«C’est à la périphérie des tumeurs que se joue la lutte entre le bien et le mal.» C’est ainsi que Nicolae Ghinea, de l’Institut français de recherche médicale (Inserm), résume ses travaux, publiés le 21 octobre dans le New England Journal of Medicine. Avec son équipe, le chercheur a découvert, chez l’humain, un point commun à onze types de cancers: le récepteur d’une hormone jusque-là connue pour son rôle dans la reproduction est présent dans les néovaisseaux développés par les tumeurs pour se nourrir. Une découverte qui ouvre des perspectives tant dans le diagnostic que pour le traitement du cancer.

Depuis une dizaine d’années, Nicolae Ghinea s’intéresse à l’hormone folliculo-stimulante (FSH). Fabriquée en très faible quantité par la glande hypophyse dans le cerveau, et transportée par le sang, elle participe, chez la femme et chez l’homme, à la production des cellules reproductrices, ovules et spermatozoïdes. Certaines cellules de nos organes reproducteurs possèdent donc des récepteurs qui captent cette hormone dans le sang.

Dès 2004, Nicolae Ghinea a cherché à comprendre si la FSH pouvait avoir un rôle dans le cancer de la prostate, par l’intermédiaire des vaisseaux sanguins qui irriguent la tumeur: «Nous avons collecté des échantillons de 7000 patients atteints de ce cancer. Et cela a été une vraie surprise: nous avons trouvé des récepteurs de la FSH exprimés par les cellules des vaisseaux sanguins des tumeurs, mais pas dans ceux des tissus sains qui les entourent, ni dans des tissus de personnes non malades. Nous pensions donc avoir trouvé un marqueur spécifique du cancer de la prostate.» Ce qui n’est pas rien, puisque le test le plus utilisé pour dépister ce cancer – un dosage sanguin de l’antigène prostatique spécifique, ou PSA – donne de très nombreux diagnostics «faux positifs».

Forte de cette observation, l’équipe a donc entrepris d’examiner des centaines d’échantillons liés à d’autres cancers, espérant ne rien voir et ainsi confirmer leur intuition. Mais, à leur grande surprise, ces récepteurs à FSH sont aussi exprimés dans les cellules de vaisseaux des dix autres types de tumeurs étudiées: sein, colon, pancréas, vessie, rein, poumon, foie, estomac, testicule et ovaire. Chose importante, ces observations se retrouvent à tous les stades – même précoces – du développement de la tumeur.


Pour en savoir plus : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/e6e52f02-dd52-11df-8de7-92ad7282a89e