Les élèves français ont du mal avec les maths

Cette année, deux mathématiciens français ont vu leurs travaux couronnés par la médaille Fields, l'équivalent d'un prix Nobel dans leur discipline. Ce palmarès 2010, portant à 11 le nombre de lauréats français sur les 52 médailles Fields décernées depuis 1936, conforte le deuxième rang mondial de la recherche mathématique française.

La France, terre naturelle de l'élite des mathématiques modernes ? Hélas, ça coince au niveau de la relève. Et, si l'école de mathématiques française possède une solide réputation, le niveau des élèves en primaire et en secondaire laisse à désirer. A en croire deux études ministérielles, quelque 40% des élèves ne maîtrisent pas suffisamment les notions du programme en mathématiques en fin de CM2 et de troisième. Un constat qui inquiète des experts et les incite à enseigner les maths autrement.
"Hétérogénéité"

Ces études de la Depp (services statistiques du ministère de l'Education), donnent les résultats de deux évaluations réalisées en mai 2008 auprès de 3809 élèves répartis dans 143 écoles et de 4381 élèves disséminés dans 163 collèges. Elles montrent une grande "hétérogénéité" des niveaux des élèves, qui "n'est pas résorbée" en fin de collège, selon leurs auteurs. 37,7% des élèves qui entrent en sixième "connaissent des difficultés en mathématiques" et "ne maîtrisent pas suffisamment les notions attendues en fin de primaire pour réussir de façon autonome au collège", affirme la première étude.

En particulier, 3,2% n'ont acquis "aucune des compétences exigibles" et 11,8% des élèves "maîtrisent quelques acquis" mais ont du mal à faire des multiplications, notamment celles avec retenues. Heureusement, le tableau n'est pas entièrement noir : près de 28% des écoliers maîtrisent de façon optimale le programme (faire les quatre opérations et le calcul mental, mettre en oeuvre des stratégies pour résoudre une grande variété de problèmes par exemple).

Compétences fragiles

Selon la deuxième étude du ministère, en fin de troisième, 44% des collégiens ont des compétences en mathématiques qui "demeurent fragiles". Parmi eux, 3% "ne maîtrisent aucune des connaissances et compétences attendues" et 12,2% ne "perçoivent pas la nécessité de valider une assertion par un raisonnement", par exemple. 28% des élèves présentent au contraire "de réelles compétences" et 28% "disposent de bases qui leur permettront d'évoluer dans une vie quotidienne".

En fin de troisième ou en fin de CM2, la Depp relève que les élèves aux performances faibles sont plus nombreux dans les zones d'éducation prioritaire et chez les redoublants. L'hétérogénéité qui ressort de ces études "est un très grave problème", a déclaré Eric Barbazo, président de l'Association des professeurs de mathématiques de l'enseignement public (APMEP). "C'est notamment parce que l'école ne parvient plus à réguler les différences sociales, comme elle l'a fait dans les années 1980 ou 1990", a-t-il estimé.

Elèves anxieux

Pour Michel Vigier, fondateur de l'association pour la prévention de l'innumérisme (le pendant de l'illettrisme en maths), les élèves en difficulté sont ceux qui n'ont pas "pu bénéficier d'un préapprentissage familial", notamment une stimulation par la lecture. Il recommande d'aborder les mathématiques autrement, en apprenant d'abord, dès l'école, "non pas la numération" (compter, dénombrer), mais "la proportionnalité, le fait de partager de manière équitable" et en "présentant tout énoncé verbal sous forme de tableau, ce qui permet de structurer sa pensée".

Les élèves ne sont-ils pas aussi anxieux ? Oui, répond la Depp, citant l'étude triennale Pisa, qui mesure les compétences des élèves de 15 ans en mathématiques, sciences et compréhension de l'écrit dans les pays de l'OCDE. En 2003, cette étude avait révélé à la fois de médiocres résultats en mathématiques et une anxiété des Français pour cette discipline. Les résultats de Pisa 2009 seront publiés mardi.


Source : lci.tf1.fr